Explorez les reliques du futur de Daniel Arsham à l'exposition du MNAAG
Musée national des arts asiatiques – Guimet
Du 21 octobre 2020 au 25 janvier 2021
À première vue, on s’étonne de voir apparaitre la Vénus de Milo ou le Moïse assis de Michel-Ange dans un espace d’art contemporain. Mais peu à peu, des fractures apparaissent sur leur corps et font advenir une véritable confusion temporelle. Et c’est toute la recherche de l’artiste américain Daniel Arsham, qui dévoile sa dernière série de sculptures inspirées de l’Antiquité. À la fois architecte et sculpteur, réalisateur et scénographe, le jeune homme de 36 ans a travaillé avec les plus grands, de sa collaboration avec le chorégraphe Merce Cunningham jusqu’à la conception du décor d’un défilé Dior. Pour sa nouvelle exposition, il a eu accès à l’atelier de moulage du Louvre afin de repenser les icônes antiques comme des archéologies fictionnelles. En partant de matériaux classiques, tels que le quartz, le ciment de gypse et la calcite bleue, l’artiste renouvelle le corps mythologique par le procédé original de la cristallisation. Pour cela, il altère les sculptures en remplaçant les cassures par de jolis cristaux, sortis de la pierre, comme par érosion.
En dialogue avec les collections du MNAAG, Arsham prévoit également d’installer un immense jardin zen japonais dans la rotonde. Pour remplacer le sable, le plancher est recouvert de ses emblématiques cristaux, cette fois-ci d’un bleu outremer, un pigment inventé par l’industriel Emile Guimet, fondateur du musée. Ce paysage lunaire, aux côtés de la blancheur éclatante de ses sculptures érodées, met en lumière le caractère intemporel de son œuvre. Surnommé « l’architecte du futur », l’artiste ne cesse de questionner notre rapport au temps, cherchant à mettre en scène des reliques d’un monde d’après. En mêlant passé, présent et futur, Arsham joue avec nos repères temporels et rejette en cela l’idée d’une œuvre fixe et finie, ancrée dans une époque. En constante évolution, l’art a selon lui une durée propre qui se renouvelle constamment par le biais de notre regard. Empruntant à la fois à l’Antiquité, au romantisme et au pop art, il dévoile une œuvre éminemment poétique qui bouscule notre idéal d’éternité.
Le saviez-vous ?
Le bleu Guimet est un pigment artificiel synthétisé par l’industriel Jean-Baptiste Guimet pour remplacer le bleu d’outremer obtenu par le broyage du lapis-lazuli, une roche métamorphique onéreuse. Ainsi, ce qui était la couleur la plus chère pour les artistes devient désormais facilement accessible. Le peintre Ingres sera le premier à l’utiliser dans sa toile L’Apothéose d’Homère (1827), suivi de Renoir et de Van Gogh, en faisant le bleu dominant des artistes de fin de siècle.