West Side Story, le music-hall le plus célèbre de l’histoire de Broadway, revient sur les planches au Théâtre du Châtelet avec de nouveaux costumes, de nouveaux décors et 31 artistes survoltés prêts à en découdre. Mais que vaut réellement cette énième adaptation de l'amour impossible entre l'idéaliste Tony et la belle Maria ?

Vous connaissez la chanson. Deux familles rivales, un coup de foudre, une scène de balcon, un amour contrarié et un dénouement final tout aussi dramatique. Zéro surprise en somme, aucune fausse note à déplorer... mais n'est-ce pas exactement ce que nous attendions de ce show gonflé à la testostérone mené tambour battant deux heures et demie durant ?

Campée dans l'Upper West Side des années 1950, force est de constater que cette relecture moderne de Roméo et Juliette n'a pas pris une seule ride depuis sa création en 1957. Fidèle à l'original, cette adaptation mise en scène par Lonny Prince suit à la lettre sa grande sœur. Les tableaux s'enchaînent sous un rythme effréné, les chorégraphies millimétrées défient un bon nombre de fois la gravité, tandis que nous suivons la violente rivalité qui oppose les Jets aux Sharks, dont les affrontements rendent hélas impossible l'union de nos deux tourtereaux.

Au-delà de sa musique et de sa partition, la vraie force de cette adaptation réside dans son casting cinq étoiles avec l'émouvant Jadon Wesbter (Tony) dont l'interprétation détonne avec celle plus musclée de ses camarades en marcel, chemise ouverte et jean moulant. Malgré sa carrure imposante disons-le, le comédien fait preuve d'une douceur déconcertante face à la lumineuse Mélanie Sierra (Maria) qui ose se détacher de l'image un peu trop lisse de la jeune fille modèle. La comédienne à la voix d'ange cabotine, fait le pitre et aborde une joie de vivre irrésistiblement communicatrice tout au long du spectacle. C'est à ces deux têtes d'affiche que nous devons sans doute la plus belle prestation de ce soir : Tonight.

Cette version ne serait pourtant pas tout à fait la même sans la fraîcheur de Kyra Sorce, l'irrésistible Anita, dont l'interprétation volcanique éclipserait presque sa partenaire de jeu. Et que dire de Taylor Harley (Riff), le leader charismatique à la gueule d'ange et à la beauté insolente des Jets, ou d'Anthony J. Gasbarre (Action Boy), la brute épaisse au tempérament de feu qui irradie de sa présence le drolatique Gee, Officer Krupke. Une seule ombre au tableau : l'absence des garçons sur le célébrissime America, traité ici sous un angle exclusivement féminin. Un tout petit regret qui n'effacera en rien l'esprit fiévreux et furieusement libre de l'adaptation, intemporelle comme tout chef-d'œuvre qui se doit.

THÉÂTRE DU CHÂTELET, 75001
Du 20 octobre au 31 décembre 2023
De 15 à 120 €