Spécial château Île-de-France: La Vallée-aux-Loups, dans l’antre de Chateaubriand
Maison de Chateaubriand
Domaine Départemental de la Vallée-aux-Loups
Ce n’est peut-être pas un château au sens strict. Mais c’est l’une des plus grandes retraites d’écrivain de l’histoire de France. Un lieu où l’architecture, les mots et la nature forment un tout. Un lieu où l’on n’habite pas seulement l’espace, mais la pensée.
En 1807, François-René de Chateaubriand achète une maison de jardinier à Châtenay-Malabry. Il vient y fuir le tumulte de Paris après avoir défié Napoléon, et y restera dix ans. Dix ans d’écriture, de méditation, de jardinage inspiré. Dix ans pour façonner ce qu’il appellera sa "solitude". Il y compose Les Martyrs, L’Abencérage, et surtout, une partie de ses Mémoires d’outre-tombe. Il fait construire une tour au fond du jardin, baptisée Tour Velléda, du nom d’une prêtresse celte. C’est là qu’il s’isole, qu’il relit, qu’il pense l’Europe, l’exil, la mort, la mémoire. Et tout autour, il plante. Des arbres venus de ses voyages, des essences rares, des sentiers sinueux, des clairs-obscurs dignes de son style. Le jardin devient une extension de son esprit.
Aujourd’hui, la Maison de Chateaubriand conserve ce souffle unique. Son portique néoclassique, ses pièces meublées à l’identique, ses objets intimes, mais surtout ce parc — ce parc qui semble parler à voix basse. On ne visite pas ici un monument. On entre dans une phrase.
EXPOSITION
Atala, 1801 - Voyage illustré au cœur d’un roman
Avant les Misérables, avant les Liaisons, il y eut Atala. Un petit roman en prose poétique, publié en 1801 par un jeune homme encore inconnu, François-René de Chateaubriand, et qui fit l’effet d’un coup de tonnerre littéraire. Une tragédie d’amour chez les Indiens de Louisiane, entre forêts vierges, missionnaires éplorés et serments impossibles. Une ode au sublime, à l’exil, à la foi, à la nature dévorante. Le romantisme venait de naître.
À la Maison de Chateaubriand, dans la Vallée-aux-Loups qu’il aimait tant, une exposition exceptionnelle ressuscite aujourd’hui l’imaginaire d’Atala, à travers estampes, éditions rares, livres illustrés, objets d’art et extraits littéraires. Un parcours en douze séquences comme douze haltes dans une jungle mentale, peuplée de visions, de palmiers rêvés, de figures en prière et de silences trop lourds.
Le lieu possède la plus riche collection publique au monde dédiée à Atala. Pour l’occasion, elle est mise en dialogue avec des chefs-d’œuvre venus du Louvre, du musée Henner, de la Toile de Jouy, de La Rochelle. Des œuvres qui disent à quel point ce récit bref a nourri la peinture, la mode, l’imaginaire colonial et la sensibilité moderne. On entre dans l’exposition comme dans un paysage intérieur. On suit Chactas, Atala, le père Aubry. On comprend le choc qu’a été ce roman pour toute une génération. Et on redécouvre un Chateaubriand poète autant que prophète, visionnaire autant que lyrique. Un écrivain qui écrivait à la torche, dans les ombres du siècle à venir.
Maison de Chateaubriand
Domaine Départemental de la Vallée-aux-Loups
87 rue de Chateaubriand, Châtenay-Malabry