Collections permanentes : Maximilien Luce au Musée de l'Hôtel-Dieu de Mantes-la-Jolie
Musée de l'Hôtel-Dieu de Mantes-la-Jolie
Collections permanentes
Maximilien Luce : un néo-impressionniste révolutionnaire ?
Il était l’un des plus grands peintres du début du siècle dernier, ami de Van Dongen, Seurat, Signac, Bonnard ou Pissarro. Maximilien Luce fait pourtant partie de ces artistes oubliés ou méconnus. C’est au musée de l’Hôtel Dieu à Mantes-la-Jolie que sont conservées ses plus belles œuvres, avec une collection inégalée de toiles du maître. De ses portraits de jeunesse à ses peintures engagées, de ses dessins satiriques à ses toiles de fin de vie, apaisées et empreintes d’un profond bonheur de vivre, le musée nous révèle le parcours d’un artiste enfin réhabilité aux côtés des peintres de son temps.
Et pour cause, Maximilien Luce (1858-1941) est un artiste inclassable, dont l’Histoire de l’art nous livre souvent la vision réductrice d’un peintre « néo-impressionniste, anarchiste et libertaire ».
Ses toiles sont à la peinture ce que les œuvres de Zola sont à la littérature, des œuvres engagées, saisissant comme personne cette impression de harassement du 2e classe au retour du combat ou de l’ouvrier au sortir de la mine. Si à ses débuts sa palette est sombre, presque achromatique, composée de tons gris, ocres et noirs, ses œuvres atteindront vite une puissance colorée visionnaire, annonçant le fauvisme.
Luce divise la couleur en apposant sur la toile de petites touches de peinture pure, comme le violet qui le distingue entre tous. Luce aime les couleurs froides du Nord, les ciels chargés, les vues de nuit, les harmonies bleutées, le crépuscule sur les bords de Seine, les effets inédits de l’éclairage urbain ou des jaillissements de flammes des hauts-fourneaux du Pays noir embrasant la nuit.
Ce maître du clair-obscur ne se contentera jamais d’audace dans ses expérimentations picturales. Il se passionne pour le sujet, pour la société de son temps, loin des œuvres contemplatives et détachées de ses contemporains. Ses portraits sont d’une expressivité rare, laissant transparaître l’intériorité parfois tourmentée des modèles. Ses paysages dépeignent une société en mutation et livrent sans nuance le point de vue de l’artiste.
Loin de rendre une vision glorifiée ou misérabiliste de l’ouvrier, sa peinture a extrait le caractère esthétique des paysages industriels et des corps tendus dans l’effort. Un peintre humaniste qui dépeint les usines, les chantiers, les écluses autant que les guinguettes ou les scènes de baignade, en mettant la figure humaine au cœur de son travail. Un dessinateur virtuose et un homme de convictions que Félix Fénéon qualifiera de « barbare mais robuste et hardi », préférant être rétrogradé soldat plutôt que de rester caporal, allant jusqu’à claquer la porte de la prestigieuse Présidence des « Artistes Indépendants », pour protester contre l’interdiction d’exposer faite aux artistes Juifs. Saisissant résumé de la personnalité de cet artiste, mêlant une grande force picturale à un engagement sincère.
Le saviez-vous ?
Édifié au XIVe siècle sous le règne de Charles V, l’Hôtel-Dieu a toujours entretenu une très forte proximité avec sa Cathédrale attenante, une tour majestueuse en bords de Seine qui fascinera de nombreux artistes, comme Turner, Chassériau, Corot ou Rodin. Le bâtiment abritera tour à tour un hospice, un orphelinat, une prison sous la Révolution, un théâtre, un cinéma, avant d'être acquis par la ville de Mantes-la-Jolie en 1962 pour devenir un somptueux musée. Avec sa chapelle classée aux Monuments Historiques, sa grande rosace surmontée d'une tête d'ange ailé, et ses ornementations, il détient aussi la plus grande collection au monde d’œuvres de Maximilien Luce.
Révélation à découvrir jusqu’au 7 décembre 2020.