Georges Bruyer, artiste-soldat sur le front : L'exposition en vidéo du Musée de la Grande Guerre de Meaux
Musée de la Grande Guerre
Du 19 mai 2021 au 3 janvier 2022
Nous nous rendons dans le plus grand musée d’Europe consacré à la Grande Guerre, ici à Meaux à une demi-heure de Paris pour redécouvrir une facette inédite de cette guerre. Remontons le temps, nous sommes au début du siècle dernier, Georges Bruyer est un artiste dont la réputation n’est plus à faire, reconnu notamment pour ses remarquables illustrations. La guerre éclate, et changera à jamais son destin, faisant de Bruyer plus qu’un peintre-graveur : un véritable artiste soldat. Jamais notre artiste ne quittera ses crayons et pinceaux, capturant chaque instant de ces moments d’Histoire, vécus sur le front ou en retrait, après avoir été blessé et évacué, puis revenant aux côtés des combattants en tant que peintre aux armées, missionné par l’Etat français.
Dans une scénographie paisible et élégante, nous feuilletons les épisodes de cette guerre terrible avec une émotion troublante. Ses huiles, ses aquarelles, ses dessins, ses croquis crayonnés sur le vif sont saisissants, empreints d’une dimension poétique et tendre qui contraste radicalement avec la violence des affrontements. 130 de ses œuvres sont ici réunies, relatant aussi bien l’évolution du style de cet artiste remarquable que celle des souvenirs de la guerre, une vision qui se trouble, des images qui s’estompent à mesure que le champ de bataille s’éloigne et que la mémoire se creuse. De ses visages aux expressions creusées, aux traits tirés et au regard las, l’artiste va progressivement ne garder que l’essentiel, la ligne, qu’il encapsulera dans des gravures formidables, aux tonalités sombres, baignées d’un bleu intense qui enveloppe ses dessins dans un nuage paisible, en décalage avec la brutalité des sujets qu’il traite.
Parmi les trésors de cette exposition, on retiendra cette série exceptionnelle de 24 estampes en gravure sur bois qui n’avaient jamais été exposées ensemble depuis leur publication en 1917. Approchez-vous de ces gravures impressionnantes. L’artiste creuse dans le bois de manière vigoureuse comme il puise dans ses souvenirs, pour ne pas oublier ce qu’il voit, ce qu’il vit, ce « qu’ils » vivent. Le quotidien des hommes sur le front, l’attente immobile, les corvées, dans une succession de scènes de jour et de nuit qui semble dérouler sous nos yeux le temps qui passe… lentement. Comme ici avec ce soldat, tapi dans l’ombre, éclairé à la lueur d’une bougie improvisée, et consacrant ses dernières forces à écrire une lettre à l’être aimé dans la froideur glaciale de l’hiver. Ces moments vécus par les soldats, dont les livres n’ont pas gardé la mémoire, Bruyer nous les livre dans des œuvres à fleur de peau qui célèbrent avec un optimisme irréductible un nouveau jour à venir. Un flamboyant témoignage de la vie dans les tranchées magnifiquement mis en scène dans cette salle qui déroule une fresque illustrée par l’artiste déployée sur des écrans géants, animée et vivante, redoutablement impliquante, nous immergeant totalement dans le quotidien de ces soldats de l’espoir. Et pour ceux qui voudraient s’essayer à la technique de l’estampe, le musée propose un atelier pédagogique qui permet de se mettre dans la peau de l’artiste et de rentrer avec son propre souvenir, réalisé ici, dans ce temple de la mémoire.
Le musée de la Grande Guerre de Meaux vous donne rendez-vous pour une exposition d'exception consacrée à Georges Bruyer, un artiste sur le front.
Tandis que l’on chemine dans le plus grand musée d’Europe consacré à la Grande Guerre, médusé devant l’exceptionnelle collection d’objets rassemblés au fil des années et déployant sur plus de 3000 m² les uniformes de soldats, fusils, avions et autres chars de combat grandeur nature qui matérialisent la mémoire du conflit, une salle d’exposition nous attire par sa lumière, nous invitant à explorer l’intimité d’un artiste-soldat oublié. À sa sortie des Beaux-Arts de Paris, Georges Bruyer est reconnu pour ses remarquables illustrations de revues humoristiques. Mais très vite, la guerre éclate et l’artiste est appelé au front en tant que peintre aux armées, ne quittant jamais ses pinceaux pour se faire le témoin du combat. Ses aquarelles, dessins et croquis sont saisissants, empreints d’une dimension poétique et empathique qui contraste radicalement avec l’âpreté des affrontements. Cette formidable exposition, qui réunit plus de 130 de ses œuvres retrace le parcours du peintre tout au long du conflit, témoignant de l’évolution de son style à mesure que le champ de bataille s’éloigne et que ses souvenirs se creusent. Les premières œuvres s’attardent sur les détails des visages, les corps accroupis dans l’attente et les silhouettes fatiguées de ses compagnons. Blessé au combat, il se concentrera durant sa convalescence sur la réalisation de gravures aux tonalités sombres, dont les aplats de bleu et les effets décoratifs traduisent une intention graphique plus marquée. Une exposition poignante qui propose également de participer à des visites guidées et à des ateliers qui mettent l’œuvre de Bruyer en regard des collections permanentes du musée, venant ainsi étoffer le tableau mémoriel de la Grande Guerre.
A la loupe dans l'expo
Voici l’une des 24 estampes sur la guerre que Bruyer publia. Le peintre renoue ici avec sa prédilection pour la gravure sur bois. On y aperçoit un soldat, tapi dans le fond d’un abri, éclairé à la bougie et écrivant une lettre du bout de ses mains froides. Le chandelier improvisé par le soldat, une petite bougie fixée sur le manche de son sabre, semble être l’unique source de lumière du tableau, qui projette l’ombre de l’homme sur la paroi de la grotte. Les contours noirs très accusés isolent le soldat dans le cadre, livrant une forte impression de poésie et de mélancolie
Le saviez-vous?
Les missions de peintres aux armées ont été lancées dès le début de la Première Guerre mondiale, avant d’être officiellement instituées en 1916. Entre le sens du devoir, le re-nouveau artistique et la force du témoignage, de nombreux peintres se sont portés volontaires, à l’instar de Jules Adler, Félix Vallotton, Édouard Vuillard ou Pierre Bonnard.