A redécouvrir - Exposition Henri Landier, maître graveur de Montmartre à l'Atelier d'art Lepic
Atelier d'Art Lepic
Fin d'année 2019
On vous propose de découvrir en vidéo une facette moins connue de l'art d'Henri Landier : son talent pour la gravure.
De l'ombre à la lumière
De l'ombre à la lumière. Une expression qui semble taillée sur mesure pour celui qui n’est autre que le dernier grand artiste de Montmartre. Nous nous sommes rendus dans son atelier d’Art Lepic, à deux pas de la place du Tertre, pour découvrir sa toute nouvelle exposition. Et là, surprise. Car si l’on connait Henri Landier artiste-peintre, celui qui a côtoyé Picasso, Dali, Hans Hartung, très proche de Bernard Buffet, ami de toujours d’Alain Bonnefoi, rares sont ceux qui connaissent sa facette de maître-graveur. Une part plus intime de son art. Ici le trait est ciselé sur bois, gravé sur plaques de cuivres ou taillé sur pierre, Henri Landier maîtrise tous les rouages de cet art ancestral qui connut ses heures de gloire au XVIe siècle, à l’origine de l’impression. Mais quand il s’agit de graver un paysage ou un visage, c’est une autre affaire que celle d’un enchainement de lettres… Le pinceau délicat laisse place ici à un outil tranchant, qu’il manie comme une plume. Virtuose. Dans une époque où l’image photoshopée prolifère, cette exposition d’estampes nous fait du bien, elle nous invite à reprendre le temps, celui de regarder les œuvres, d’imaginer l’artiste à l’ouvrage, sculptant minutieusement chaque trait presque subliminal d’une œuvre qui n’est pas encore. Il faudra graver à l’envers comme écrivait Léonard de Vinci, projeter les perspectives, imaginer l’œuvre inversée, puis l’encrer, tonalité par tonalité. Un savoir-faire que notre artiste maîtrise depuis 65 ans… Une vie. De ses premières œuvres datées de 1954, gravant l’image d’un Paris sombre, figé par le froid glacial de l’hiver, Henri Landier a 19 ans, il est un sans un sou, peint la misère, sans pathos, poétique. Le docker de Dunkerque, ou la vague Bleue nous rappellent ses années de matelot, l’eau-forte de la Roue de Marly résonne comme l’unique souvenir d’une œuvre aujourd’hui disparue, puis les années Provence, qui invitent la lumière du sud dans ses œuvres, le trait noir s’efface peu à peu pour laisser place aux couleurs ensoleillées. Pierre Mac Orlan écrivait « l'œuvre d'Henri Landier est une suite incomparable des confidences de l'ombre. L'ombre double de la lune et du soleil ». Un artiste au talent aussi immense que son humilité est grande, une sensibilité à fleur de peau, ancrée dans des œuvres rayonnantes. Parfois un noir intense parfois charbonneux, parfois une brume lilas, parfois des couleurs flamboyantes, déposées une à une sur le papier gravé. Comment fait-il que chaque estampe soit si singulière ? Tout est fait à la main, Henri Landier travaille sur une authentique presse à bras du XVIIIe siècle, sans moteur, une masse de 2 tonnes dont il tourne le volant pour encrer ses œuvres, appuyant plus ou moins pour obtenir le rendu précis et unique qu’il attend. Comme Rembrandt et Dürer en leur temps. Rien d’automatisé, le geste artistique prime. Ce qui fait de chaque tirage une œuvre originale et unique. Alors on a osé. On a demandé les prix. A partir de 200 euros et jusqu’à 2500 euros, vous pouvez obtenir une gravure authentique et signée de Landier. Peut-être une idée de cadeau originale pour Noël ?
Un maître à Montmartre
S’il y a bien un atelier à visiter à Montmartre, à deux pas de la Butte, c’est assurément celui d’Henri Landier, l’un des plus grands artistes contemporains français. Un talent immense, une humilité troublante, une personnalité rayonnante et une sensibilité à fleur de peau. En bref, un artiste hors norme. Nous l’avons rencontré pour vous. Henri Landier est un peintre de génie, mais il est aussi l’un des derniers maîtres graveurs en France. Une tâche ardue, d’une technicité imparable. Ses mains sont celles d’un sculpteur, noires d’encre, marquées par le travail de gravure. Ciseler le motif sur le bois massif ou sur la plaque de cuivre, les enduire d’encres, passer une feuille humide sous la presse, et découvrir l’œuvre imprimée, c’est unique. Quelle émotion !
Henri Landier est un maître qui nous apprend à regarder d’un œil nouveau, ses œuvres connues du grand public, à déceler l’incroyable richesse de leur palette chromatique, les nuances d’encres qui dessinent le trait, et confèrent à chaque gravure une expression originale si singulière. Nous continuons notre visite dans son vaste atelier avec son incroyable verrière luxuriante, impensable dans le Paris d’aujourd’hui... Ici le temps semble s’être arrêté. Henri Landier n’est pas qu’un artiste résistant, qui perpétue l’esprit de la butte, il est aussi un magicien qui réussit à nous faire rêver en nous offrant une respiration merveilleuse à l’abri de l’agitation de la capitale.
De l’ombre à la lumière 65 ans de gravure
C’est l’histoire d’un incroyable destin que nous présente l’Atelier d’Art Lepic, celui d’Henri Landier, peintre-graveur. Sur un total de 2000 gravures en 65 ans de création, c’est à travers une sélection d’une centaine d’œuvres que le titre de cette exposition prend tout son sens : « De l’ombre à la lumière ». Comment un jeune adolescent aspirant à être peintre, est-il devenu un artiste de renom, notamment connu pour ses estampes comme La Rue Saint Vincent ? Tout commence par le Paris sombre, froid et insalubre d’après-guerre en 1954 qui nourrit l’œuvre d’un jeune adolescent vivant dans la précarité. C’est dans cette âpreté et noirceur que l’exposition débute, avec la série dite des gravures de ténèbres. Impossible de ne pas tomber en admiration par exemple devant l’ingénieuse Roue de Marly ou Le Hangar de Sartrouville. Prêts à passer du côté obscur à la lumière ? Apprêtez-vous à sentir la chaleur via les couleurs de Landier ! C’est le fameux passage de l’ombre à la lumière. En 1963, La Provence sera sa révélation artistique. L’obscurité de la capitale laisse place aux applats fauves et détonants si propres à cette région du Sud. Plus qu’un changement de vie, c’est un changement de vue qui s’opère comme en témoignent ses lithographies La plaine de Ménerbes et Les toits de Pourrières. Il ne faudra pas seulement vous attendre à des gravures puisque dessins, bois gravés et aquarelles complèteront l’itinéraire de la visite.
Quand vie et art vont de pair
L’œuvre artistique d’Henri Landier a ceci de fascinant qu’elle est indissociable de sa vie. Des quais de Seine au Canal de l’Ourcq en passant par le mythique Montmartre, le jeune Henri sillonne la capitale, son carnet de croquis en main pendant qu’il étudie parallèlement le jour, la peinture et le dessin à l’Ecole Nationale des Arts Appliqués à Paris, il travaille la gravure la nuit chez Lacourière avec Jacques Frèlaut. Ne pouvant subvenir à ses besoins, en 1954 il s’engage alors pendant cinq ans dans la marine marchande. La chaleur et la solidarité de l’équipage lui donnent accès à un monde qu’il ne connaît pas. Cette expérience l’aide à se construire personnellement et lui donne par la suite la force de mener à bien son œuvre avec rigeur. En 1975, la création de l’Atelier d’Art Lepic marque un tournant décisif dans sa carrière. Elle lui permet une indépendance artistique et financière totale. Depuis, l’artiste peint et dessine sans cesse Paris et ses banlieues en proie aux mutations auxquelles il assiste ; villes en construction, ports et chantiers navals, danseurs de Buto et usines en ruines sont immortalisés dans les quelques milliers de toiles qu’il peint. Plus qu’une marque du temps qui se meut, l’Atelier au pied de la Butte Montmartre est une invitation à la persévérance, à la résilience et à redécouvrir la beauté du monde selon Landier.
"Montmartre c’est pour moi, un village dans Paris où j’aime vivre." Henri Landier