La Bourse de Commerce et le Centre Pompidou s'associent le temps d'une exposition-évènement autour de Charles Ray
C’est une découverte pour la plupart des Français. Charles Ray, l’un des sculpteurs américains les plus insaisissables, fait l’objet d’une double exposition à Paris, orchestrée simultanément au Centre Pompidou et à la Bourse de Commerce. Une première pour cet artiste peu conventionnel… Pourtant, de loin, rien de bien saisissant. On admire des sculptures immaculées, de blanc ou d’argent, s’élançant à la manière des marbres grecs dans des espaces dénudés. Des sculptures moins sages qu’elles n’y paraissent, parfois même censurées comme ce jeune garçon tenant une grenouille en mauvaise posture. Un malaise sous-jacent, presque indicible, s’installe chez le visiteur. Un sentiment accentué par l’impression de vide qui entoure les statues. Car l’artiste est obsédé par l’espace, au point même qu’il aurait, selon la légende, fait envoyer une dizaine de caisses vides à un acheteur pour lui rappeler que ses créations ont besoin d’air… pour respirer. Exécution à la lettre ici chez François Pinault. Alors on s’interroge… Que fait ce camion rouillé perdu au milieu de l’exposition ? Une œuvre qui a nécessité 5 années de travail, pendant lesquelles le sculpteur a compressé son vieux pick-up avant de le déplier, dans une extrême minutie, redonnant ainsi vie à cette "ruine" mécanique. Des sculptures intrigantes, dérangeantes souvent, reproduisant de manière troublante le réel en le déformant, comme ces mannequins XXL qui semblent toucher le plafond, ces silhouettes errantes que l’on ne regardait plus avant de les observer dans un musée, ou cet incroyable tronc d’arbre de plus de 10 mètres d’envergure à admirer au Centre Pompidou. Une sculpture d’une tonne et demi, reconstruite de toute pièce ; une salle construite sur mesure pour ce colosse venu en grue dans l’institution parisienne, lui qui n’avait jamais quitté son musée américain. L’artiste métamorphose tel un alchimiste les matériaux, sculptant aussi bien le marbre, le bois ou le ciment, les fibres de verre ou le papier. Comme ici avec cette sculpture étonnante ornée de motifs pop, revisitant avec audace les Vénus allongées de la Renaissance. Nous croisons ensuite le chemin d’une carcasse de tôle, la reproduction parfaite de l’épave d’une voiture hantée par la mort, qui semble presque sereine, figée au paradis des accidents de la route. Et comme pour clôturer cet instant malaisant, l’artiste nous confie avoir convié quelques fantômes dans son exposition… Un équilibre subtil entre un classicisme intemporel et une contemporanéité des plus radicales, pour deux expositions qui devraient faire réagir.
Il est l’un des sculpteurs américains les plus insaisissables de la scène contemporaine. À l’aube de ses 70 ans, Charles Ray fait désormais l’objet d’une rétrospective majeure dans la toute jeune Bourse de Commerce qui s'associe à l'indétrônable Centre Pompidou pour orchestrer ensemble l’une des plus grandes manifestations jamais consacrées au sculpteur en Europe. Une première pour cette figure incontournable de la sculpture contemporaine outre-Atlantique, dont les apparitions en France se comptent sur les doigts de la main. Et pourtant, l’artiste provoque partout où il passe un étrange malaise. En 2009, cet ami proche de François Pinault avait déjà généré un certain désarroi lors de l’ouverture de la Punta della Dogana à Venise avec son Boy with Frog. Cet enfant nu de 2,50 mètres en acier inoxydable, tenant fermement la patte d’une grenouille visiblement en mauvaise posture, incarnait alors une forme de violence passive tout à fait troublante résumant sans doute à lui seul l’univers embarrassant de Charles Ray. Ce jeune colosse au sadisme sous-jacent reprend alors tous les codes du sculpteur. Une œuvre globale désormais visible dans deux musées parisiens, qui réussissent le pari de réunir plus d’un tiers de son travail à Paris.
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