Amis pour la vie au Théâtre de l’Œuvre – Le théâtre du lien et du temps qui passe
THÉÂTRE DE L’ŒUVRE
Du 17 avril au 29 juin 2025
Ils s’engueulent, ils s’attendrissent, ils se renvoient des souvenirs comme on se jette des balles usées. Sur scène, deux hommes assis côte à côte. Deux amis d’une vie, ou presque. Paul et Jean, réunis par l’habitude, les silences, les éclats, les absences. Ce pourrait être une fin de partie, mais c’est au contraire un début d’aveu, un éclat de tendresse tardif. Daniel Russo et Bernard Menez donnent chair et rythme à cette comédie douce-amère écrite et mise en scène par Francis Joffo, dans une pièce qui ne cherche pas à faire événement — elle préfère durer, doucement, au creux de la mémoire.
Ce n’est pas un théâtre de geste, ni d’action : c’est un théâtre de la parole, de l’écoute, du regard. La mise en scène est volontairement discrète, effacée derrière la musique du texte, comme une toile de fond silencieuse. Joffo ne veut rien démontrer, il laisse ses personnages se dévoiler par petites touches, dans un dialogue qui rappelle ces conversations nocturnes où l’on rit à moitié, où l’on se confesse sans trop s’y autoriser. Ce qu’il met en scène, ce n’est pas seulement une amitié : c’est le temps, celui qui passe, qui use, mais qui attache.
Daniel Russo, tout en nerf et en ironie, donne à Paul une acidité attendrissante. Bernard Menez, plus lunaire, plus fragile, joue en creux, avec un art du contrepoint parfait. Ensemble, ils trouvent une complicité rare, faite de regards obliques, de silences pleins, de sourires esquissés. Leur duo ne repose pas sur la mécanique, mais sur la chaleur d’une familiarité sincère, celle de deux acteurs qui partagent plus qu’un texte : une expérience de jeu, une mémoire commune.
Il y a des éclats de rire, bien sûr, mais pas de grosse ficelle. Le comique vient des situations anodines, des petits règlements de compte et des vérités trop longtemps remises. Les répliques font mouche sans chercher le trait d’auteur. Ce sont des paroles d’hommes, simplement. On y parle de vie, de femmes, d’amitiés oubliées, de promesses trahies, de souvenirs enfouis. Et parfois, entre deux rires, quelque chose serre. Une phrase, un regard, une absence.
Amis pour la vie ne prétend rien révolutionner, et c’est ce qui fait sa beauté. Il s’en dégage une grande humanité, une pudeur juste, un sens du rythme qui tient à la respiration des comédiens plus qu’à la mécanique dramaturgique. On pense à une vieille chanson, familière, un peu cabossée, qu’on croyait avoir oubliée mais dont on retrouve les paroles au bout des lèvres.
THÉÂTRE DE L’ŒUVRE, 75009
Du 17 avril au 29 juin 2025
Avec D. Sardou, A. Paradis et M-A. Casta
Du jeu. au sam. à 20h puis 21h à partir du 1er juin, dim. à 15h
De 20 à 35 €
Billetterie